Introduction :
Lors de la seconde guerre mondiale, les hommes n’ont pas été les seuls à organiser des mouvements ou réseaux de résistance contre l’occupation et le gouvernement de Vichy. A cette époque, les femmes n’avaient aucun droit politique et aucun partage de l’autorité parentale : elles étaient d’une certaine façon marginalisées dans la société. Elles ont longtemps été les oubliées de cette guerre, cependant, elles agissaient de manière active et n’hésitaient pas à prendre des risques pour leur patrie ou pour la Liberté dans ces mouvements ou ces réseaux. Elles ont ainsi caché des maquisards, des Juifs, des résistants, des prisonniers de guerre évadés,des aviateurs alliés abattus au dessus du sol français, … Comment les femmes résistantes ont réussi à ancrer leurs noms dans l’histoire d’Angers ? Nous allons vous raconter leur histoire.
I- Des femmes, de toutes origines, de tous âges
Nous allons, ci dessous, vous présenter 6 femmes résistantes et angevines. Elles ont mené un rude combat face à l’occupation allemande.
Eugénie Poilane dit Ninette , est née le 1er avril 1906 à Saint-Pierre-Montlimard dans le Maine-et-Loire. Lors de sa jeunesse, elle entreprend des études de médecine, qui seront interrompues par l’entrée en guerre en1939. Elle décide alors de s’engager dans la Résistance intérieure. Afin de couvrir ces convictions patriotiques, elle installe son cabinet de soins en tant qu’infirmière à Saint-Pierre-Montlimard. Le Général de Gaulle avait écrit à son sujet: « Elle apporta une aide aussi importante qu’efficace à son chef de réseau et accomplit avec une abnégation digne de tous les éloges diverses missions périlleuses ». Elle s’éteint le 16 janvier 2002.
Jeanne Héon-Canonne est née le 5 janvier 1906 à Cholet. C’est cependant à Saint-Léger qu’elle effectuera ses études, qui déboucheront dans le domaine médical. Au cours de sa formation universitaire, elle rencontrera son mari Michel Canonne, avec qui elle se mariera. Ensemble, ils effectueront des actes de résistance à Angers pendant l’occupation. Ils seront arrêtés en 1944 puis amenés dans la prison du Pré-Pigeon. Après sa libération, elle retrouvera sa maison vide et recommencera immédiatement à travailler. Elle reste sans nouvelle de son mari qui sortira en mai 1945. Elle décède en février 1978.
Marie Talet, née le 14 décembre 1884, était directrice au collège pour jeunes filles Joachim-du-Bellay. Les locaux du collège sont occupés en 1940 par les troupes allemandes. Les enseignants et élèves se réfugieront dans une école de garçons. Arrêté en 1943 pour avoir diffusé des idées anti-allemande dans son établissement de jeunes filles, elle est déportée et meurt de dysenterie au camp de concentration de Ravensbruck le 14 décembre 1944.
Lucienne Simier est née le 7 juin 1897. Elle était professeur d’économie et économe au collège Joachim du Bellay. En 1943, elle est arrêtée par la Gestapo, en plus de 5 autres professeurs qui sont suspectés de diffuser des idées anti-allemandes et déportée . Elle est décédée le 10 mai 1987 à Angers.
Jeanne Letourneau, professeure de dessin née le 13 novembre 1895 à Angers, fut une des figures de la mobilisation des femmes en Anjou, au sein de la Résistance. Elle étudie le dessin à Paris, puis devient enseignante dans ce domaine au collège de jeunes filles Joachim du Bellay, toujours à Angers. Elle est arrêtée le 13 mars 1943 et emprisonnée. Elle est par la suite déportée au camp de Ravensbrück où elle arrive le 27 avril 1943. Puis, elle est déplacée au camp de Rechlin pendant quelques semaines avant de revenir à Ravensbrück entre mars et avril 1945. A son retour, Jeanne Letourneau relate ces deux années passées à Ravensbrück dans un ouvrage intitulé « Clichés barbares », accompagné de ses dessins effectués au camps. Enfin, elle reprend ses activités d’enseignante au lycée d’Angers jusqu’en 1955. Elle est nommée chevalier de l’ordre de la Légion d’Honneur en 1952. C’est en 1979 qu’elle s’éteindra.
Jeanne Héon-Canonne est née le 5 janvier 1906 à Cholet. C’est cependant à Saint-Léger qu’elle effectuera ses études, qui déboucheront dans le domaine médical. Au cours de sa formation universitaire, elle rencontrera son mari Michel Canonne, avec qui elle se mariera. Ensemble, ils effectueront des actes de résistance à Angers pendant l’occupation. Ils seront arrêtés en 1944 puis amenés dans la prison du Pré-Pigeon. Après sa libération, elle retrouvera sa maison vide et recommencera immédiatement à travailler. Elle reste sans nouvelle de son mari qui sortira en mai 1945. Elle décède en février 1978.
II- Des actions engagées contre l’Occupation allemande et la collaboration du gouvernement de Vichy
Ces femmes ont été arrêtées pour leurs idées et pour les actions qu’elles menaient contre l’occupant et le gouvernement de Vichy, un régime autoritaire et collaborateur. Leur combat effréné pour défendre la liberté leur a coûté des mois de souffrance et d’emprisonnement, voire la mort.
Ninette a eu une proposition en 1940 : servir l’ Intelligence Service, les services secrets anglais, en échange d’argent. Elle a refusé car elle ne voulait pas servir la France Libre et les alliés pour de l’argent. Elle deviendra agent de liaison pour le réseau Cohors-Asturies à Nantes et a caché un lieutenant-colonel de l’Armée Secrète et le suppléera dans les liaisons avec les groupes résistants d’Angers ou de Nantes. Dénoncée, elle est arrêtée le 31 mars 1944. Elle subit la torture mais ne cède pas et n’avoue rien.
Jeanne Héon-Canonne et son mari ouvriront un cabinet médical près de la gare d’Angers. Pendant la guerre, ils entrent en résistance contre l’occupant. Ils organisent des filières d’évasions et comme médecin ils empêchent le départ de certaines personnes vers le travail obligatoire (STO) en Allemagne en faisant de faux certificats. A la suite d’une dénonciation, ils seront arrêtés le 20 Juin 1944. Après plus d’un mois d’interrogatoires et de torture, Jeanne quitte Angers le 6 août 1944. Elle réussira a s’évader lors d’un arrêt du train près de Tours.
Marie Talet est arrêtée le 5 février 1943 avec l’économe, Lucienne Simier et quatre enseignantes du collège : Anne-Marie Baudin, professeur d’anglais ; Marthe Mourbel, professeur de philosophie ; Jeanne Letourneau, professeur d’arts plastiques ; et Marie-Madeleine James. Les six femmes, qui avaient formé un groupe de résistance aidant notamment des réfugiés et des jeunes filles juives, auraient été dénoncées. La directrice est accusée d’avoir un « esprit anti-allemand ». Incarcérée à la prison d’Angers, transférée à Romainville, puis à Compiègne d’où elle est déportée au camp de concentration pour femmes de Ravensbrück avec ses collègues du lycée.
La Gestapo avait accusé ces six professeurs d’avoir eu des idées anti-allemandes auprès de leurs élèves. Cependant, ces femmes s’étaient toujours opposées à la dictature nazie ainsi qu’à la collaboration. Lucienne Simier a été déportée en compagnie de Marie-Talet, Marthe Mourbel, Anne-Marie Baudin, Marie-Madeleine James et Jeanne Letourneau.
III- Plusieurs seront déportées au camp de concentration pour femmes : Ravensbruck
Ravensbrück est une commune dans laquelle le régime nazi établit de 1939 à 1945 un camp de concentration, spécialement réservé aux femmes et dans lequel vécurent aussi des enfants. Les conditions sanitaires étaient déplorables et les rations de nourritures misérables . La surpopulation du camp, doublée d’une mauvaise hygiène, entraîna une épidémie de typhus qui se répandit dans tout le camp.
Au printemps 1942, ce sont environ 1600 femmes et 300 hommes qui furent envoyés à la mort à Bernberg. . Plus tard en 1942, et jusqu’en 1944, une seconde phase de meurtres par « euthanasie » eut lieu dans les centres de mise à mort, notamment celui de Hartheim. . À partir de l’été 1942, les médecins SS soumirent les prisonnières de Ravensbrück à des expériences médicales contraires à toute morale. Ils testèrent des traitements contre les blessures avec diverses substances chimiques, pour prévenir les infections, ainsi que des méthodes de fixation et de transplantation des os. Il fallait parfois pratiquer des amputations. Beaucoup en moururent, et la plupart des survivantes souffrirent de lésions irréversibles. Les médecins SS procédèrent également à des tests de stérilisation sur des femmes et des enfants, dont de nombreux Tziganes, dans le but de mettre au point une méthode efficace.
Marie Talet finit par mourir de dysenterie dans le camp le 14 décembre 1944. Anne-Marie Baudin est empoisonnée ou gazée. Marthe Mourbel décède sur le chemin du retour 15 mai 1945, après la libération du camp par les troupes alliées. Lucienne Simier, Jeanne Letourneau et Marie-Madeleine James reviennent à Angers le 18 avril 1945.
Ninette est, le 14 juin 1944, déportée à Ravensbruck, puis à Buchenwald, dont elle rentrera, ne pesant plus que 28Kg et atteinte de la maladie d’Hodkin. Cinq années lui seront nécessaires pour se rétablir.
Lucienne Simier a passé la plus grande partie de sa détention au camp de Ravensbrück (du 1er mai 1943 au 14 février 1945). Une fois libérée, elle va écrire un livre nommé : « Deux ans au bagne de Ravensbrück », dans lequel elle raconte les horreurs qu’elle et les autres détenus ont vécu. C’est de ce camp qu’elle gardera les souvenirs les plus douloureux. Sa libération advint lors d’un échange de prisonniers avec les Alliés.
Jeanne Letourneau, comme toutes femmes déportées dans ce camp, resta traumatisée, mais elle s’en est sortie vivante. Ce qui l’a beaucoup aidé,, ce sont ces dessins. Ces derniers lui permettaient d’évacuer la souffrance contenue en elle. A travers ces dessins, Jeanne Letourneau dénonce les atrocités inhumaines commises dans le camp de concentration.
Conclusion
La première réaction des survivantes, lors de leur libération, a été de se taire et de garder le silence sur toutes les atrocités qu’elles avaient subies mais avec le temps qui passe, et les gens qui sont de plus en plus à l’écoute de leurs histoires, beaucoup ont réussi à se livrer.
Il y eut ce silence après le camp car les femmes ne voulaient pas reparler de l’horreur qu’elles avaient vécue et même si elles en étaient capables en 1945 les témoignages des survivantes n’intéressent pas ou bien, devant l’immense déshumanisation décrite dans les paroles de déportées, le déni est toujours la solution la plus facile et choisie par les gens à cette époque.
Suite à leurs actes de résistance, ces femmes, connues, reconnues ou inconnues, ont eu beaucoup de reconnaissance de la part des hommes, des citoyens. La République a, par ailleurs, accordé le droit de vote à toutes les femmes en 1944, près d’un siècle après le suffrage universel masculin.
Plaque commémorative se trouvant dans le cloître du lycée Joachim du Bellay.